Le risque pénal des dirigeants d’entreprise ou d’association :
Dans une France d’aujourd’hui extrêmement « judiciarisée », la justice est utilisée pour traiter les litiges habituels mais aussi de plus en plus pour statuer sur les relations entre les dirigeants, les salariés et les clients de l’entreprise. Le droit pénal est la branche du droit qui régit les infractions, autrement dit, les transgressions sociales définies par le législateur (crimes, délits ou contraventions). Dans ce cadre, dix dirigeants d'entreprise sont placés en garde à vue chaque jour en France, par ailleurs nos tribunaux rendent annuellement près de 40.000 condamnations pour infractions au droit du travail et infractions économiques et financières. Le risque pénal doit donc être une préoccupation majeure pour les chefs d’entreprise, d’autant plus que ses provenances sont multiples et variées (plainte d’un salarié, non respect des règles d’hygiène et de sécurité, négligences diverses, non conformité des matériels, accident du travail, abus de bien social, harcèlement etc...). Les dirigeants sont de plus en plus exposés aux risques et les domaines de leur responsabilité pénale s’ accroissent au fur et à mesure, au gré des lois et des règlements. Un problème d’ordre pénal peut être dévastateur tant sur un plan personnel pour le dirigeant, mais aussi pour l’image et la pérennité de l’entreprise. Certains chefs d’entreprise l’ont bien intégré et cherchent à s’en préserver. Malheureusement, nombre d’entre eux n’en ont pas conscience, plus préoccupés par l’évolution de leurs projets, leur chiffre d’affaire, la satisfaction de leurs clients ou le management de leurs salariés. Ils sont pris dans les soucis du quotidien qui leur font oublier l’éventualité du risque, d’autant plus brutal lorsqu’il survient à l’improviste.
Les personnes en cause ne sont pas forcément des délinquants, certaines se retrouvent entraînées dans des situations délicates :
- En amont : par ignorance des risques encourus et la façon de s'en prémunir
- En aval : par méconnaissance des réflexes de base à mettre en œuvre en cas de problème survenu (accident du travail d'un salarié, plainte d'un collaborateur etc.) et la manière de se comporter lors d’une enquête judiciaire. Les dirigeants s'assurent avant de subir un sinistre, de même, ils devraient aussi se former pour connaître et anticiper le risque pénal car un jour ou l’autre, toutes les entreprises y sont confrontées. Bien qu’il les concerne toutes, le risque pénal n’est pas identique pour toutes les sociétés. Celles du bâtiment, du transport ou de l’industrie sont, par exemple, plus exposées à un accident du travail qu’un prestataire de service intellectuel. Pour bien cerner ces différents risques, il convient donc d’effectuer une cartographie en rapport avec l’activité de ’entreprise. Dans les grandes sociétés, cette identification est généralement effectuée par les personnes en charge de chaque domaine spécifique (opérationnel, sécurité, juridique, « risks manager » etc...). Dans les petites structures démunies de ces services intégrés, cette identification ne s’ effectuera en interne que par le chef d’entreprise et ses cadres. Ils auront cependant la possibilité d’avoir recours à des «sachant » mandatés en externe. Il est nécessaire que le personnel opérationnel soit associé à cette cartographie, généralement lui seul connaît bien les comportements dangereux ou les modes opératoires à risques. Une implication de tous les échelons de la hiérarchie permet d’être plus efficace et de motiver l’ensemble des salariés. Lutter contre le risque pénal, c’est aussi lutter pour la sécurité et le bien être au travail. Il est nécessaire de l’expliquer à tous et de faire preuve de pédagogie afin d’obtenir une efficacité optimum. Le sujets de menaces en matière pénale ne manquent pas : accident du travail, non respect des règles de sécurité, machines et installations défaillantes, non-respect de modes opératoires, négligences diverses, formations inexistantes ou insuffisantes, délits informatiques, droit à l’image, atteintes à l’environnement, pots de départ alcoolisé qui finit mal, gestion d’un salarié alcoolisé ou sous l’emprise de drogue, non respect du droit du consommateur, harcèlement moral et sexuel, discrimination, faute de gestion, abus de bien social, fraude fiscale,infractions sur les marchés publics, suicide d’un salarié, etc...La liste est longue mais non exhaustive, loin s’en faut. Elle pourrait encore être longuement complétée et détaillée tant les sources de problèmes sont nombreux. Il faut dire que les codes et règlements en tous genres, complexes et variés, ne facilitent vraiment pas la tâche des dirigeants. D’autant plus que ces textes changent et évoluent régulièrement sous l’impulsion du législateur ou de l’administration nationale ou européenne. Après avoir localisé les éléments générateurs du risque, les dirigeants pourront ensuite les évaluer afin d’estimer leur portée et leurs conséquences éventuelles (amendes pénales et dommages et intérêts déséquilibrant l’équilibre financier de la société, image négative projetée sur les clients et le public etc...). Les responsables pourront également mettre en place des mécanismes de prévention tels que des protocoles de tâches, des chartes éthiques, des codes de bonnes conduites, des délégations de pouvoir mais aussi des formations pertinentes et adaptées. Toutes ces mesures sont à même de diminuer efficacement le risque pénal et donneront des arguments de poids à la défense devant un tribunal.
Bien sûr, il est impossible de tout prévoir et de tout anticiper. Cependant, avoir identifié les sources principales du risque pénal, avoir stipulé les moyens de s’en prémunir dans des textes, tels que le document unique des risques ou des fiches de tâches, et surtout avoir mis en place des plans d’actions concrets, tout ceci
permet de limiter efficacement le risque mais aussi de protéger les dirigeants des sanctions pénales qui pourraient les frapper.